Une pépite à la Médiathèque d'Elven
Pierre Lemaitre, prix Goncourt 2013, dans son nouveau roman "Miroir de nos peines" complète sa série "Les Enfants du désastre". Après "Au-revoir là-haut" et "Couleurs de l’incendie", il clôt sa trilogie dans la France de 1940, de la drôle de guerre à l’exode. Voici un récit qui éveille en nous tous les sentiments qui nous bouleversent, nous effraient, nous humanisent : compassion, effroi, stupeur, joie … Une œuvre historique et romanesque qui a pour décor une période où le pire était quotidien dans cette France de l’exode, de la faim, de l’incertitude, de la honte. On douterait de certains passages si la nombreuse documentation fournit par l’auteur à la fin de l’ouvrage ne validait pas notre étonnement.
Parmi les acteurs de cette saga, Louise, qui découvre les lettres passionnées de sa mère, on se demande pourquoi certain Docteur Thériot a cette curieuse habitude de déjeuner au même endroit, chez Monsieur Jules, chaque jour depuis des années, à la même table. Voici Raoul mauvais garçon, escroc habile, sans scrupule, maltraité toute son enfance par une marâtre, et qui trouvera son chemin de Damas dans l’amour rédempteur, Gabriel, militaire dans la garde et qui triche avec le règlement pour adoucir les ordres ubuesques des cadres supérieurs. Brutalité, lâcheté, héroïsme au quotidien. Il y a encore parmi tous ces témoins de la dégringolade un usurpateur génial et sympathique, dont la faconde et l’imagination n’ont pas de limite, et qui apporte au texte une légèreté bienvenue.
Les chapitres défilent et nous enveloppent, la guerre est décrite dans toute son horreur, on découvre la ligne Maginot, les incohérences d’un état-major sans ressources, d’une armée sans moyens, des déplacements laborieux de prisonniers de droit commun, des panzers allemands, des bombardements… Au chapitre suivant on retrouve nos héros dans leur fuite avec pour seul but de ne pas se faire mitrailler, doutant d’être encore vivant le jour suivant, Ils sont éparpillés sur des chemins de misère et de mort, Selon qu’ils sont civils ou militaires dans cette débâcle.
Le rythme soutenu du texte, ne nous laisse aucun répit dans la lecture, et chacun des 39 chapitres est une découverte.
Coup de coeur Lecteur - Antoine